MARONITE (ÉGLISE)

MARONITE (ÉGLISE)
MARONITE (ÉGLISE)

MARONITE ÉGLISE

Dans un pays qui compte une vingtaine de communautés religieuses différentes, l’Église maronite retient l’attention par le nombre de ses fidèles (900 000), par son rôle historique dans la naissance du Liban, par son poids humain et politique, par son insertion dans le monde arabe, par le statut de son clergé et par sa place originale au sein de l’Église catholique. Elle est l’une des Églises qui résulte de l’éclatement confessionnel du patriarcat d’Antioche. Les maronites en rattachent la fondation à saint Maron (vers 350-433). En réalité, ses origines, plus récentes, se situent au VIIe siècle et se trouveraient dans son appui au monothélisme (ou unicité de volonté dans le Christ), compromis doctrinal proposé par l’empereur Héraclius Ier dans l’espoir de mettre fin aux controverses monophysites qui divisaient son empire depuis le concile de Chalcédoine (451). En fait, ce compromis fut rejeté par le concile œcuménique de Constantinople de 680 parce qu’il déniait au Christ une volonté humaine distincte de sa volonté divine, portant ainsi atteinte à sa parfaite humanité. Ce concile, ignoré ou refusé jusque-là, ne sera «reçu» par les maronites qu’en 1099. Au demeurant, la thèse de leur perpétuelle orthodoxie ne remonte qu’au XVIe siècle.

À partir du XIIe siècle, l’Église maronite se trouve en communion vécue avec Rome. Les croisades lui permettent un contact direct avec le siège apostolique, à l’égard duquel elle témoignera d’une indéfectible fidélité. Son patriarche assiste au IVe concile de Latran de 1215. Dans une série de synodes, de la fin du XVIe au milieu du XVIIIe siècle, on relève même une forte influence des institutions et des usages liturgiques latins, adoptés sous l’égide de légats jésuites (Eliano, Dandini), tandis que des générations de prélats sortis du collège maronite, fondé à Rome en 1584, renforcent le même courant. En dehors des emprunts au concile de Trente, on notera l’interdiction du divorce (1580) et la création de diocèses (1736), demeurés inconnus dans une Église d’origine et de structure monastiques. Plus heureux que les melkites des mêmes régions, entièrement byzantinisés, les maronites conservent l’essentiel de leur identité syriaque, cependant que leurs érudits (les Assémani, Ecchellensis) auront initié l’Occident à la tradition orientale. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, l’Église maronite (qui n’a jamais eu de branche orthodoxe) est la tête de pont de l’uniatisme en Orient: les nouveaux hiérarques orientaux catholiques, qui n’ont pas encore obtenu leur reconnaissance civile de la part de la Sublime Porte, trouvent auprès d’elle appui et refuge.

Dans la lente émergence de la nation libanaise aux XIXe et XXe siècles, les maronites jouent le rôle essentiel: ils en sont toujours la confession la plus importante et leur patriarche jouit d’un important prestige politico-religieux, même aux yeux des non-chrétiens. Malgré une importante diaspora, l’Église maronite demeure une Église essentiellement nationale, son appartenance au monde arabe lui fixant, cependant, une vocation dans le dialogue islamo-chrétien. Le retour à ses sources syriaques, et donc sémitiques, qu’elle accomplit depuis quelques années, l’y prédispose également. Durant la guerre civile commencée en 1974, son patriarche et ses évêques ont été des artisans, peu suivis, de la paix confessionnelle.

S’il est vrai qu’elle s’est quelquefois trop laissé influencer par la tradition latine, comme lorsque son monachisme s’est transformé en congrégations de réguliers à la suite du nouveau Code de droit oriental (1954), sur bien d’autres points l’Église maronite assure un pluralisme, bienvenu à l’intérieur de l’Église catholique. Ainsi, un clergé marié, exerçant souvent un métier, a chez elle plein droit de cité. Par ailleurs, sa hiérarchie n’est pas nommée par le pape, mais simplement confirmée par lui. Elle n’a plus de rôle de patronage à l’égard des autres Églises orientales catholiques. Mais, dans sa vocation catholique, elle aura du moins une grande responsabilité dans le rétablissement du dialogue islamo-chrétien, sur un pied d’égalité, à l’issue d’une longue guerre civile où les facteurs confessionnels auront servi de couverture à des intérêts complexes, d’une tout autre nature que religieuse.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Поможем решить контрольную работу

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Eglise Maronite — Église maronite Église maronite Fondateur(s) Disciples de Maron Union à Rome N’a jamais été séparée Primat actuel Patriarche Nasrallah Boutros Sfeir …   Wikipédia en Français

  • Eglise maronite — Église maronite Église maronite Fondateur(s) Disciples de Maron Union à Rome N’a jamais été séparée Primat actuel Patriarche Nasrallah Boutros Sfeir …   Wikipédia en Français

  • Maronite — Église maronite Église maronite Fondateur(s) Disciples de Maron Union à Rome N’a jamais été séparée Primat actuel Patriarche Nasrallah Boutros Sfeir …   Wikipédia en Français

  • Église catholique maronite — Église maronite Église maronite Fondateur(s) Disciples de Maron Union à Rome N’a jamais été séparée Primat actuel Patriarche Nasrallah Boutros Sfeir …   Wikipédia en Français

  • Église maronite — Fondateur(s) Disciples de Maron Union à Rome N’a jamais été séparée Primat actuel Mar Bechara Boutros Rahi Siège Bkerké, Liban Territoire primaire Liban Extension territoriale (diaspora libanaise) …   Wikipédia en Français

  • maronite — [ marɔnit ] n. et adj. • 1489; du patriarche Maroun ♦ Chrétien appartenant au rite oriental de Syrie et du Liban, qui a conservé la liturgie syriaque et fait partie de l une des Églises uniates. Adj. Prêtre, patriarche maronite. ● maronite… …   Encyclopédie Universelle

  • Eglise catholique syriaque — Église catholique syriaque Église syriaque catholique Fondateur(s) Michel Jarweh Union à Rome 1662, puis 1783 Primat actuel Ignace Joseph III Younan depuis le 21 janvier 2009 …   Wikipédia en Français

  • Église catholique syriaque — Église syriaque catholique Fondateur(s) Michel Jarweh Union à Rome 1662, puis 1783 Primat actuel Ignace Joseph III Younan depuis le 21 janvier 2009 Siège Beyrouth, Liban Territoire primaire Proche Orient Extension territoriale États Unis …   Wikipédia en Français

  • Église syriaque — Église catholique syriaque Église syriaque catholique Fondateur(s) Michel Jarweh Union à Rome 1662, puis 1783 Primat actuel Ignace Joseph III Younan depuis le 21 janvier 2009 …   Wikipédia en Français

  • Église syrienne — Église catholique syriaque Église syriaque catholique Fondateur(s) Michel Jarweh Union à Rome 1662, puis 1783 Primat actuel Ignace Joseph III Younan depuis le 21 janvier 2009 …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”